La médiatisation parfois tapageuse qui accompagne certaines situations d’expulsions locatives tend à occulter qu’il s’agit d’une procédure extrêmement réglementée et soumise à un protocole de prise en charge relevant davantage de la prévention sociale que de la descente aux enfers. La réalité des situations qui conduisent à une telle résolution judiciaire ne saurait se réduire à considérer l’expulsion du logement comme le problème en soi. Bien souvent en effet, l’expulsion est l’arbre qui cache la forêt tandis la véritable problématique se situe ailleurs, que ce soit en termes d’insalubrité des lieux, de détresse financière ou psychologique, de refus d’admettre certains droits légaux ou autre situation plus nuancée qu’il n’y paraît de prime abord.

Il peut être alors utile de rappeler que les huissiers sont des auxiliaires de justice garants de l’application de la Loi et que, précisément, la Loi ALUR de mars 2014 s’appuie sur la CCAPEX* en tant qu’organe de prévention et de lutte contre l’expulsion. Commission dont le rôle est de résoudre les litiges liés aux impayés de loyers et de faciliter le relogement des locataires en difficulté, la CCAPEX se trouve désormais systématiquement avisée des commandements de payer adressés par voie d’huissier à un locataire défaillant. La Loi 2017 relative à l’égalité et la citoyenneté, qui consacre un volet important au logement, a en effet rendu obligatoire la transmission dématérialisée des notifications de résiliation de bail et d’expulsion des locaux à usage d’habitation par le biais d’une interface dédiée (article 152).

Cette plateforme nommée EXPLOC a pour finalité de produire une traçabilité dans les procédures engagées. Relevant la recrudescence des décisions judiciaires d’expulsion ainsi que l’augmentation des exécutions effectives, les instructions ministérielles faites aux préfectures en 2017 soulignent le besoin de coordination entre une détection en amont des locataires en difficulté et leur gestion en urgence.

C’est pourquoi EXPLOC, en servant d’interface d’échanges entre l’huissier de justice et les administrations étatiques concernées, se présente comme un outil apte à renforcer et fiabiliser les interventions en faveur de la prévention de l’expulsion locative. L’objectif attendu est bien celui d’une diminution des procédures d’expulsion grâce à un traitement mieux coordonné et immédiatement distribué entre les acteurs territoriaux aux compétences sociales et juridiques additionnelles. Les procédures d’apurement de dette et de relogement devraient ainsi s’en trouver fluidifiées, plaçant en dernier recours le concours de la force publique et permettant une prise en charge plus en amont des difficultés des locataires.
L’huissier de justice joue ainsi pleinement son rôle de médiateur, en contribuant à la prise en charge d’une situation humainement instable, grâce au signalement EXPLOC dont les répercussions dépassent la seule poursuite judiciaire.

* Commission de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions locatives, présidée par le Préfet ou son représentant.

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